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21 novembre 2007 3 21 /11 /novembre /2007 14:58
Rapport sur le règlement du passif humanitaire et la question des déportés mauritaniens (juillet 2007)

Avant-propos

Le Comité de Suivi et de Gestion des Préjudices (CSGP) a été mis en place en France le 08 juillet 2007, à la faveur du changement politique et institutionnel intervenu au sommet de l’Etat mauritanien, avec l’élection à la présidence de la République au mois de mars 2007 de Monsieur Sidi ould Cheikh Abdallah.

Les engagements du candidat réitérés après son élection, en faveur de la résolution de la question des déportés et du lourd passif humanitaire hérité du régime déchu, ont été concrétisés par la mise en place d’un comité ministériel qui s’occupe de ces deux questions.

Le CSGP s’est donné pour ambition de faire le point, de la manière la plus exhaustive possible, sur l’ampleur des événements qui ont fortement secoué la communauté négromauritanienne, victime d’une répression aveugle de l’ancien régime.


1) Le cadre d’étude du rapport

Le cadre de cette étude prend naturellement pour point de départ le début de la répression, après la publication du manifeste du négro-mauritanien opprimé (publication des FLAM) et se termine avec la chute du régime le 03 août 2005.

Ce choix se justifie à plusieurs points de vue, par le fait que :

a) La répression contre les FLAM ne s’est pas limitée qu’à ses seuls militants ou sympathisants : elle a frappé sans discernement des personnes toutes issues de la communauté négro-mauritanienne, à l’échelle du pays.

Le soupçon d’appartenance à ce mouvement a été le prétexte des exactions menées au quotidien dans les régions du sud du pays, mais aussi aux arrestations arbitraires et aux contrôles d’identité vexatoires menés contre les négro-mauritaniens qui se déplacent à l’intérieur du pays.

b) De même, intègre le cadre de cette étude la violente répression des auteurs de la tentative de coup d’Etat d’octobre 1987, en raison du caractère disproportionné des sanctions prononcées, alors même qu’il n’y avait pas eu commencement d’exécution. Ces sanctions sans commune mesure avec celles prononcées contre les militants baathistes auteurs des faits similaires révèlent une orientation éminemment raciale des sanctions.

Tous ces faits ne sont pas neutres dans la tragédie des événements d’avril 1989 dont les effets s’intensifieront sur plusieurs années de cauchemars et de répression contre la communauté négro-mauritanienne jusqu’en 1993. Après cette date, la répression continuera dans les régions du sud du pays, sous une forme moins intense, avec quelques pics, au gré et aux humeurs des forces de sécurité régnant en maîtres ; ce sera le lot des populations de ces régions jusqu’à la chute du dictateur.

Le cadre de cette étude vise donc à bon droit :

confiscation et destruction de biens, de documents administratifs (identité, état civil, titres de propriété, …) et autres,
  • contre la communauté négro-mauritanienne, pour des raisons politiques et raciales
  • commis sur le territoire de la République Islamique de Mauritanie entre 1986 et le 03 août 2005 inclus.
2) Les cas exclus de la présente étude

a) Les cas de répression politique

Ils sont nombreux dans la période visée par le rapport et intègrent généralement le cadre des contradictions politiques habituelles. Nous rangeons dans cette catégorie la répression contre les militants baathistes, fondamentalistes et contre l’opposition démocratique depuis 1987 jusqu’à la chute du régime le 03 août 2005.

En effet, malgré la force de la violence qui la caractérise parfois, la réponse du pouvoir déchu aux putschistes baathistes en 1987, à l’activisme de son opposition institutionnelle, à la montée des réformistes d’obédience islamiste ainsi qu’à l’insurrection armée qui s’est levée contre lui en fin de règne, n’induit pas d’actes de représailles à caractère généralisé contre les groupes dont sont issus les mouvements contestataires.

Ce caractère quasi-ordinaire des rapports dans cette catégorie ôte toute pertinence au traitement de ces questions dans le présent rapport.

b) La question de l’esclavage

Elle fait déjà l’objet d’un traitement spécial dans le cadre des travaux de la première législature du tout nouveau parlement issu des élections législatives de novembre 2006. Nul doute que la question de l’esclavage est un drame humanitaire qui touche une grande partie de la communauté nationale.

A ce titre, elle a bien sa place dans le cadre d’une étude traitant du passif humanitaire. Toutefois, en raison de son caractère structurel et séculaire, il requiert un traitement spécifique à long terme, qui touche plusieurs niveaux de compétences et exclut tout traitement d’urgence.

Aussi, la question de l’esclavage qui est une réalité en Mauritanie n’est pas traitée dans le présent rapport.

3) La méthodologie suivie

La méthodologie suivie pour la rédaction de ce rapport est fondée sur l’impératif d’apporter des réponses les plus objectives et les plus exhaustives possible à la mission qui a été assignée au comité de suivi et de gestion des préjudices (CSGP) :

  • identification des victimes
  • évaluation des préjudices
  • réparations
S’agissant de l’identification des victimes, le choix d’une compilation de données provenant des rapports d’associations nationales ou internationales de défense des droits de l’Homme s’est vite imposé à nous : ces données, sans être exhaustives, ne présentent pas moins l’avantage de renseigner sur l’ampleur de la répression contre la communauté négro-africaine de Mauritanie par le régime déchu.

Pour une identification claire des victimes, nous avons choisi délibérément de faire une présentation dans le temps et l’espace, des différents cycles de répressions, tels qu’ils sont relatés par les rapports de l’époque. Toute omission de nom ou toute erreur dans ce travail de synthèse serait involontaire et nous nous en excusons par avance.

Etant donné l’ancienneté des faits rapportés, nous sommes conscients que certaines situations ainsi que certaines données doivent être actualisées : ce sera le cas des quelques fonctionnaires réintégrés, des villages déguerpis dont certains se seraient reconstitués,… Un travail d’identification sur le terrain s’impose pour retraiter ces données brutes, afin d’identifier l’ensemble des victimes de cette période sombre de l’histoire de notre pays. S’agissant de l’évaluation des préjudices, elle procède même des conséquences des actes portant atteinte aux biens, aux droits et à l’intégrité des personnes identifiées comme étant victimes des événements rapportés.

Le rapport ne quantifie pas financièrement les chefs de préjudices, notre comité n’ayant ni les moyens ni les informations nécessaires pour une telle entreprise. Aussi, notre tâche a consisté à identifier par catégories, les chefs de préjudices susceptibles de donner lieu à réparation ; les catégories identifiées ne doivent donc pas être limitatives.

S’agissant des réparations, nous avons voulu d’abord situer les responsabilités encourues sur le plan pénal, avant d’envisager les conséquences sur le plan des intérêts civils : ces deux aspects de la réparation (sanction et indemnisation) ne seront pas complètement efficients, s’ils ne sont accompagnés de mesures complémentaires, à caractère politique, qui devront prévenir désormais la répétition des événements objet de ce rapport.

Outre ces trois parties énumérées, le rapport est complété par des documents annexes permettant de mieux saisir son contenu : il en est ainsi des actes de procédures initiés par le collectif des avocats mandaté par les victimes et les familles de victimes militaires, des rapports ou extraits de rapport sur la répression de 1990-1991 et sur le charnier de Sory Malé, de la liste des présumés tortionnaires ainsi que la liste des victimes ou ayants droit de militaires disparus, vivant actuellement en Europe et aux Etats-Unis d’Amérique. Tel est globalement le travail fourni par le Comité de Suivi et de Gestion des Préjudices après un mois de travail et d’investigations.

A l’instar de tous les acteurs sociaux du pays, le comité communiquera son rapport dès son approbation par l’instance qui l’a érigée, aux autorités mauritaniennes, par l’entremise du comité ministériel chargé du retour des déportés et du passif humanitaire. Par ce biais, nous espérons apporter notre contribution à la résolution d’un problème autour duquel tourne l’avenir de l’unité et de la stabilité de notre pays.




Note: Info source : Comité de Suivi et de Gestion des Préjudices
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